Dans l'ami de mai on pou­vait lire « Il faut donc accep­ter la pré­sence de "mau­vaises herbes" ? Oui. La gestion dif­féren­ciée, c’est aus­si accep­ter une cer­taine va­rié­té vé­gé­tale. Il faut ré­sister au ré­flexe condi­tion­né qui consiste à détruire systé­ma­ti­que­ment toute forme de plante sau­vage sous pré­texte d’un souci (dé­ri­soire) de "pro­pre­té". Les "mau­vaises herbes" ne le sont en fait pas tant que ça. Elles sont même sou­vent utiles au sein de l’éco-sys­tème na­tu­rel ! ». Super ré­ponse, on n'au­rait pas dit mieux ! Mais alors...

Gestion dif­féren­ciée ?

Ave­nue Ga­briel Fau­ré, se trouve une telle zone... in­té­gra­le­ment ton­due !
Dom­mage : « l'hi­ver, la meilleure ali­men­ta­tion pour les oi­seaux sont les graines conte­nues dans les herbes hautes (...) si vous en avez la pos­si­bi­li­té, lais­sez des zones sau­vages. C'est impor­tant car énor­mé­ment d'in­sectes et d'oi­seaux sont en train de dispa­raître par manque de lieux pro­pices. Don­nez-leur une pe­tite chance. » Da­mien De­karz, la Perma­cul­ture au jar­din.

Qu'est-ce qui est sale ?

Voir l'em­ployé des espaces verts pro­me­ner sa bou­teille de gaz à lon­gueur d'été pour éradi­quer les pis­sen­lits des trot­toirs nous question­nait : qu'est-ce qui est plus sale ? Un pis­sen­lit ou un pis­sen­lit brû­lé au gaz ?
L'ar­gu­ment avan­cé par les col­lec­ti­vi­tés est im­pa­rable : c'est mieux que les pesti­cides. Certes.
Ren­sei­gne­ments pris, bien uti­li­sé, un désher­beur thermique au gaz n'est pas cen­sé brû­ler mais pro­vo­quer un choc thermique dont la plante au­ra du mal à se re­mettre. Cô­té fac­teur hu­main, il est plus ra­pide et moins fa­ti­gant que le désher­bage ma­nuel.
En ce qui concerne les in­con­vénients, son ef­fi­ca­ci­té est li­mi­tée sur les vé­gé­taux à ra­cines pro­fondes (comme notre pis­sen­lit !), et la cha­leur nuit à la pe­tite faune alen­tour, utile pour le sol. De plus, elle ré­veille éga­le­ment des graines en­dormies, ce qui néces­site d’un se­cond pas­sage après seule­ment quelques jours.
Et le gaz alors ? Bu­tane et pro­pane ont beau avoir la ré­pu­ta­tion d'être des éner­gies re­la­ti­ve­ment propres, la meilleure éner­gie n'est-elle pas celle qu'on ne consomme pas, voire qu'on ne pro­duit pas ? Sans par­ler des en­jeux géo­po­li­tiques !
Un autre élément nous a fait ré­agir : Dans le jour­nal muni­ci­pal de sep­tembre, on pou­vait lire : « La muni­ci­pa­li­té or­ganise une nou­velle "jour­née éco-ci­toyenne" dans le cadre de la Jour­née mon­diale de net­toyage de la pla­nète. (...) Au pro­gramme : désher­bage ma­nuel des trot­toirs (…). » Où l'on doit com­prendre que les "mau­vaises herbes" sur les trot­toirs sont sales du coup et pas écologiques en plus ? Voire l'un des fléaux qui souillent notre pauvre pla­nète et dont il faut la dé­bar­ras­ser de toute ur­gence ?!? Que le désher­bage ma­nuel est plus éco­lo­gique que le thermique pour­tant re­te­nu pour l'entre­tien com­mu­nal ?!?
C'est en­core une fois un po­si­tion­ne­ment pour le moins illi­sible et in­co­hé­rent ! Que fait-on ?

Il faut ré­sister au ré­flexe condi­tion­né !

Et si on lais­sait les pis­sen­lits sur les trot­toirs ? Il fau­drait s'ha­bi­tuer à une ville moins mi­né­rale et rec­ti­ligne, avec de la vie re­belle ici ou là. Est-ce impos­sible ? Notre re­gard a dé­jà chan­gé sur ces in­dé­si­rables puisque le terme "ad­ven­tice" rem­place do­ré­na­vant ce­lui de "mau­vaise herbe". Et puis, ce ne sont pas des pis­sen­lits qui vont en­dom­ma­ger le trot­toir ! Et si l'em­ployé muni­ci­pal fai­sait autre chose pen­dant ce temps-là ? (Genre du ma­raî­chage bio en ré­gie pour la cantine comme pro­mis lors de la pré­cédente cam­pagne des muni­ci­pales mais jamais mis en oeuvre semble-t-il ?)
Osons même : Et si cha­cun était res­ponsable de l'entre­tien du pe­tit bout de trot­toir de­vant chez lui ? On pour­rait ima­gi­ner des mo­ments dé­diés, des ren­dez-vous sur le trot­toir où l'on pour­rait échan­ger sur ses pra­tiques entre voi­sins « Moi je veux que ce soit ni­ckel, je mets du gros sel. », « Moi je pré­fère mettre des fleurs vivaces, vous vou­lez des graines d'onagre ? ».
Al­lons en­core plus loin : Et si on re­vé­gé­ta­li­sait les rues, fa­vo­ri­sant la bio­di­ver­si­té, di­mi­nuant la tempéra­ture, inci­tant les vé­hi­cules à ra­len­tir et les ci­toyens à se dé­pla­cer à pied ?

Deux exemples

Des ini­tia­tives inspi­rantes existent, des ter­ri­toires au­da­cieux osent le chan­ge­ment !

Nous pen­sons ici à la ville de Mont­réal et ses ruelles vertes (photo) qui de­puis 1997, n’ont ces­sé de pous­ser. Au­jourd’hui, il y a une cen­taine de tron­çons. Amé­na­ger une ruelle verte consiste à ver­dir les bandes ri­ve­raines de la voie pu­blique. Le pro­jet est ini­tié par les ri­ve­rains, dans le cadre du pro­gramme "Faites comme chez vous" dont l'ob­jec­tif est de sou­tenir les ci­toyens dans leurs ini­tia­tives d'ap­pro­pria­tion de l'espace pu­blic.

Plus près de nous, le pro­jet "Caen au pied du mur" aide les ha­bi­tants qui le sou­haitent à vé­gé­ta­li­ser leurs pieds de murs sai­gnées de 15 cm de large) pour re­ver­dir et fleu­rir les rues de la ville. En pra­tique, un ha­bi­tant vou­lant vé­gé­ta­li­ser de­vient am­bas­sa­deur. Il va voir les autres ha­bi­tants de sa rue et réunit ceux qui sont par­tants. Un po­choir est réa­li­sé au pied du mur par l'as­so­cia­tion à la de­mande de l'ha­bi­tant. Il indique qu'il ne sou­haite pas que l'on vienne entre­tenir son pied de mur. Il le jar­dine ou bien il laisse s'y instal­ler une flore spon­ta­née.

Ca vous dit ?